La prolifération des sangliers est-elle devenue incontrôlable ?



Ces vingt dernières années, les populations de sangliers ont été multipliées par six en France et les prélèvements atteignent des records. Les effectifs de bêtes noires explosent aussi partout en Europe. Il faut dire que le sanglier, animal intelligent et opportuniste, bénéficie d’un fort taux de reproduction, d’une nourriture abondante et de la quasi-absence de prédateurs naturels.

« Les prélèvements sont toujours en progression et je pense que ce n’est pas près de s’arrêter », confie Thibault Varenne, vice-président de la Fédération départementale des chasseurs de la Gironde (FDC 33), qui compte 16 737 sangliers au tableau de chasse (1) pour la saison 2022-2023.

Le sanglier s’adapte très vite à son environnement. Il a une activité aussi bien diurne que nocturne. Il migre et on le rencontre depuis plusieurs années déjà en périphérie des grandes villes, et même parfois gambadant sur les pelouses des ronds-points !

« Avec la Métropole de Bordeaux, nous avons mis en place une association de chasse périurbaine, rapporte Henri Sabarot, président de la FDC 33. Des sangliers venaient se nourrir au pied des silos de maïs à Bassens, faisaient des dégâts sur les greens du golf bordelais et dans la réserve naturelle. On en rencontre également en bordure de la rocade. Pour endiguer ce fléau, nous avons développé le tir à l’affût et à l’approche. »

Entre plaisir et corvée

Dans ce hit-parade des départements les plus touchés par la présence de la bête noire, la Dordogne figure en tête de la région, avec 18 068 animaux tués à la fin de la saison de chasse 2022-2023, tandis que les Deux-Sèvres, avec 2 993 têtes, est le plus préservé. « La chasse doit rester le principal outil de régulation, insiste Thibault Varenne. Même si les mesures administratives de destruction augmentent tous les ans et que les louvetiers sont de plus en plus sollicités. »

Le sanglier est res nullius, il n’appartient à personne, pas plus aux chasseurs qu’au reste de la société »

Les chasseurs oscillent désormais de plus en plus entre plaisir et corvée lorsqu’il s’agit de participer à des battues tous les week-ends, de l’automne au printemps. Et pourtant, il est essentiel de maintenir la pression. Chasser le plus possible est une nécessité, car le sanglier a un prix : celui des indemnisations versées par les fédérations de chasse aux agriculteurs après les dégâts causés aux cultures par le gibier. La facture est salée et s’élève au plan national entre 70 et 80 millions d’euros.

Les battues deviennent parfois une corvée pour les chasseurs.
Les battues deviennent parfois une corvée pour les chasseurs.

Archives Sud Ouest

Sanction financière

« Le système actuel n’est plus viable, il faut sortir de la loi actuelle afin de préserver les intérêts des agriculteurs, tempête Régis Hargues, directeur de la fédération des Landes. Il est impossible de faire supporter uniquement sur des bénévoles une mission de service public pour laquelle nous sommes sanctionnés financièrement. D’autant que le sanglier est res nullius, il n’appartient à personne, pas plus aux chasseurs qu’au reste de la société. »

En 2023, la Fédération nationale des chasseurs a signé un accord avec les chambres d’agriculture, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA) et les Jeunes Agriculteurs reposant sur une « boîte à outils » qui a pour objectif de réduire de 20 à 30 % au niveau national les surfaces agricoles détruites par les sangliers. « La loi de 1968 sur le système d’indemnisation doit être totalement modifiée sur le fond, plaide le président de la FNC, Willy Schraen. C’est une urgence économique de premier ordre, le temps n’est pas à l’opulence financière chez les chasseurs et nombreux sont ceux qui vont jeter l’éponge. »

(1) Dans le tableau ci-dessus, les chiffres concernent uniquement les prélèvements par les chasseurs et ne comptabilisent pas les mesures de destruction par les louvetiers, à l’exception des Landes.


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